Cape Cross

Le ciel est entièrement couvert mais le vent est tombé. Puisque nous sommes restés sur notre faim hier soir, nous nous rendons au lodge pour prendre le petit déjeuner.

La réserve de Cape Cross ouvre ses porte à 10 h, ce qui nous laisse le temps pour une promenade sur la plage. La marée descendante découvre les rochers envahis de moules, d’huîtres et autres mollusques pour le bonheur des oiseaux qui se régalent. Mouettes, bécasseaux, toune-pierres … s’affairent à choisir leur pitance. Plus loin une jeune otarie, mortellement blessée, s’est échouée sur la plage et au large une autre s’agite de tout côté ; c’est sans doute sa mère qui le cherche.

Devant le portail de fortune cadenassé de la réserve, nous attendons patiemment, comme il se doit en Afrique. Il est près de 10 h 30, les hommes sortent de leur voiture et tentent, sans succès, d’ouvrir la barrière. Encore quelques instants et la tête d’un jeune homme apparaît au sommet de la piste ondulée. Nous pouvons enfin entrer.

La réserve de Cape Cross est la plus importante d’Afrique australe. Ses 60 km² de rochers et de plages de gravier sont envahis de quelques cent mille otaries à fourrure australe. Ce nombre peut dépasser les deux cent mille en novembre et décembre car c’est la période de reproduction.

Ce gigantesque attroupement mouvant me laisse perplexe. José est ravi et savoure l’instant. Au large, de très nombreuses otaries sont occupées à pêcher. Elles agitent constamment une nageoire caudale, comme pour signaler à leurs congénères que tout va bien, mais en réalité ces gesticulations les soutiennent simplement dans l’eau.

Cape Cross – jeunes otaries

L’otarie à fourrure appartient à la famille des otariidés. Elle possède une large tête et un museau pointu. Les mâles peuvent peser jusqu’à 350 kg. Ils ont le ventre clair tandis que celui des femelles est plus foncé. L’otarie à fourrure se différencie du phoque par ses petites oreilles externes bien visibles.

Le phoque, qui appartient à la famille de phocidés, ne possède pas de pavillons au niveau de l’oreille. Autre différence majeure, ces deux carnivores n’ont pas les mêmes nageoires. Celles de l’otarie sont plus grandes, ainsi elle peut se redresser sur ses nageoires pectorales et avancer en faisant des petits bonds. Sous l’eau elle les utilise comme des palmes. De leur côté, les phoques, plus adaptés à la vie aquatique, ne peuvent se déplacer sur le sol qu’en rampant. Lorsqu’ils nagent, leurs nageoires restent plaquées contre leur corps.

Otaries de Cape Cross
Otaries de Cape Cross

Les otaries de Namibie se nourrissent des crustacés et des céphalopodes qu’elles trouvent en abondance dans les eaux de la côte atlantique d’Afrique australe grâce aux résurgences d’eau froide en surface (phénomène d’upwelling). Mais elles attirent toujours divers charognards notamment des hyènes brunes et des chacals à tête noire. Leur principal prédateur est le requin blanc qui lui peut faire de grands ravages. Pour tenter de limiter les pertes, les otaries nagent alors en groupe ou créent des mouvements directionnels afin de produire un contexte d’affolement.

Cape Cross tient son nom de la croix de pierre que Diego Cao y implanta en 1486.

Diego Cao découvrit ce cap côtier du Sud de la Namibie lors d’une expédition à la recherche de la route des Indes, menée au nom du roi du Portugal Joao II. Il avait emporté sur son navire le ‘Padrao’, une borne de pierre surmontée d’une croix, afin de marquer le territoire conquis part la Couronne portugaise chrétienne.

Sous le protectorat allemand, la croix fut expédiée en Allemagne. Deux ans plus tard, en 1895, Guillaume II, souverain de l’Empire allemand, fit ériger une réplique à l’endroit original. Cette croix fut à nouveau envoyée en Allemagne. Actuellement en possession du Musée archéologique de Berlin, la croix originale n’a pas été restituée. En 1968, l’emplacement du ‘Padrao’ fut déclaré monument national et une nouvelle réplique, en dolérite du pays, fut érigée à l’endroit exact où se trouvait la stèle plantée par Diego Cao.

Réplique du Padrao Diego Cao

Le Spitzkoppe

Le Il n’aura fallu que quelques kilomètres pour retrouver un ciel entièrement dégagé, aussi bleu et radieux que nous l’avions espéré. Nous profitons de notre solitude sur celle longue ligne droite de gravier qui conduit au mont Spitzkoppe pour préparer un bon petit café.

J’ambitionne une escalade jusque sous l’arche. La pente au pied de l’arche est raide et glissante, mais j’y arrive. Malheureusement, il ne m’est pas possible de grimper jusque dans l’arche par ce côté, la pente est vertical et il n’y a aucune prise. Il ne me reste qu’à redescendre.

Un guide de la communauté qui gère le site, nous propose une visite des peintures rupestres des Bushmen. On peut y reconnaître une pieuvre, un rhinocéros, un lion ainsi que des figures humaines, une scène de chasse et une représentation familiale avec des enfants.

Il y a 6000 ans, le Spitzkoppe était habité par des Bushmen (San), les premiers habitants de Namibie. Dans le Bushman Paradise on peut admirer les peintures rupestres qu’ils ont réalisé au cours d’une période s’étalant entre – 4000 et – 2000 ans. D’autres peintures garnissent un surplomb de granit appelé Small Buschmen Paradise. A proprement parlé, il ne s’agit pas d’un art mais d’un moyen de communication à vocation cérémonielle, chamanique, thérapeutique ou encore didactique.

« De nombreux exemples de peintures rupestres Bushman (au moins 37 ont été découverts à ce jour) sont visibles dans la région de Spitzkoppe et on pense qu’ils datent des années 2000-4000 . La majeure partie d’entre elles se trouvent dans le paradis de Bushman, considéré comme l’une des plus belles collections d’art rupestre de la Namibie. Cette grotte est connue des Européens depuis le début du 20ème siècle. Malheureusement, certaines de ces peintures sont gravement endommagées par le vandalisme. Les peintures rupestres bushman de la grotte du paradis ont été proclamées monument national en juillet, 1954… »
Extrait de ; Peintures de la caverne Spitzkoppe

Notre visite se termine, nous devons maintenant nous rendre au Spitzkoppe Tented, Camp & Campsite.

Un jeune couple indigène dirige la campée. A la réception, on nous propose gracieusement de nous installer dans un chalet en toile équipé de tout le confort. Il y a un restaurant d’allure un peu rustre mais nous irons souper pour les remercier.

La nuit tombée, José s’installe sur la terrasse de notre chalet et un chacal vient lui rendre visite.

L’horizon rougit et, dans les buissons, des lézards aboyeurs, au chant très particulier, semblent imiter le rire sarcastique des fantômes de théâtre … on se croirait à Halloween.

Le Spitzkoppe est situé dans la région de l’Erongo, à proximité de la ville d’Usakos. Depuis la longue piste qui traverse une immense plaine entièrement plate, le Spitzkoppe émerge tel un mirage. Au fil de la journée ses couleurs changent, passant du rose à l’orange, du violet au rouge.
Son nom afrikaans, qui signifie littéralement chapeau pointu, provient de sa forme. On l’appelle aussi « Le Cervin de Namibie ». C’est un inselberg qui s’est mis en place il y a 140 millions d’années. Son sommet culmine à 1728 m.
Ce pluton granitique résulte de la cristallisation lente du magma dans les zones profondes de l’écorce terrestre au cours de laquelle les granites intrusifs sont passés à travers de longues fissures. Son démantèlement et le façonnage des roches aux formes d’arches, de bassins, ou encore en pain de sucre sont dus à l’érosion sus-jacente.



Oiseaux, lézards, écureuils, spingboks, damans des rochers, tout un petit monde qui semble jouer paisiblement dans cet Eden chaleureux.

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